22 August 2024

Le Puit de la Roche Pertusa par l’escalier de la Fuvelle

Durant ma deuxième semaine de vacances, et tandis que le reste de la famille est à Pralognan, je pars en solitaire avec pour objectif de réaliser une sélection de ‘randonnées du vertige’ dans le Vercors et Devoluy :

Préparation

Sur cet itinéraire, dont la page de blog de Pascal Sombardier rassemble les seules informations dont je dispose, il va me falloir gérer deux obstacles: tout d’abord une section de grimpe en traversée donnant accès au pied de l’escalier, et surtout une descente enchainant de nombreux rappels, sur un itinéraire à priori très peu – voir pas ? – répété depuis l’ouverture de Pascal Sombardier. J’ai certes vu quelques récits mais tous indiquent n’avoir pas su trouver les rappels et avoir abandonné.

Pour la première difficulté, qui je dois l’avouer m’avait fait reculer et renoncer l’an dernier, je réfléchis pendant la nuit à la manière de procéder pour m’auto-assurer, ce sera une première.

Avant mon départ, j’ai eu un échange avec Pascal qui m’a proposé de joindre une personne motivée pour y aller et .. recommandé de prendre un perforateur car il n’est pas sûr que les points posés soient toujours en place. Je ne ferai ni l’un ni l’autre.

Concernant la descente, qui constituera le gros de l’engagement de cet itinéraire hors normes pour moi, j’innove là aussi. Je prends évidemment ma corde de rappel 2x50m et ce qui va avec pour descendre .. et remonter. Mais aussi et surtout : un jeu de pitons mous, une très grande longueur de cordelette, un marteau, un tamponnoir avec mèche SDS de 8, avec des goujons, des plaquettes de différentes tailles, et une clef pour serrer les écrous.

En ajoutant 2,5 litres d’eau, un petit piolet et les bâtons, le matériel photo et tout l’attirail ‘standard’, je dois dire que le sac est bien lourd.

Pour arriver au point de départ à la combe du loup, je ne suis pas bien le chemin recommandé, et me retrouve en sentier très 4×4, dont franchissement d’ornières dans la boue. C’est très ludique mais dommage ; pourquoi ai-je nettoyé la voiture hier ? :)

La course

En arrivant, l’objectif du jour et tout le trajet sont dores et déjà visibles. C’est très sauvage, ce grand cirque minéral qui nous enveloppe pose l’ambiance.

La montée se déroule sans encombre et je trouve très rapidement l’attaque du passage grimpant.

Je m’équipe, et vais expérimenter pour la première fois l’auto-assurance. J’accroche tant bien que mal un brin de 50m de corde à mon baudrier. En fait il me gênera en trainant dans mes pieds. Comme j’ai peur du poids de mon sac dans la traversée, je l’accroche et le laisse au départ.

Et c’est parti pour un fastidieux aller-retour-aller, car il me faudra franchir trois fois le passage, la dernière fois avec le sac. J’ai été influencé par des photos, et ne lis pas suffisamment bien l’itinéraire à emprunter pour faire la traversée. Mes deux premiers trajets empruntent une section engagée, sans points, et plus grimpante que nécessaire. Au troisième passage, l’évidence me saute au yeux .. et je trouve les spits posés par mes prédécesseurs. J’ai perdu beaucoup de temps sur ce franchissement, mais je ne voulais pas me planter dans des manœuvres nouvelles pour moi.

Je reprends alors tranquillement ma route jusqu’au pied de l’escalier.

Avant d’attaquer la montée de l’escalier à proprement parler, je fais un “break visio” pour souhaiter bon anniversaire à ma chère maman – oui ça capte dans cette zone portant si isolée !

J’entame tranquillement la montée jusqu’au promontoire herbeux assez facile à trouver.

La sortie est proche, et il est tentant d’y aller, mais je préfère garder un peu de marge de temps ; pour une prochaine fois peut-être ?

Arrivé sur le promontoire herbeux, j’y trouve assez facilement le premier relai, dans un bloc de rochers isolés dans la pente. Il me dépose à l’aplomb du premier à pic.

Je cherche partout R2, il me semble évident qu’il doit être dans les parages, et finalement le trouve .. quasi sous mes pieds.

Premier rappel en fil d’araignée, j’appréhende car le rocher est pourri et en descendant je visualise tous ces bouts de rocher qui n’ont qu’une envie: se décrocher et me tomber sur la tête.

J’en décroche préventivement certains, et les jette au bas, ce qui semble provoquer une explosion dans la combe plus bas. Outre les chutes de pierres, l’autre enjeu majeur pour moi: ne pas coincer la corde. Alors je fais bien attention au placement et transit. Sur cette section, je n’ai pas trop peur, ça bascule très vide dans le vide alors ça devrait aller.

Le fil d’araignée mène juste à l’aplomb de l’emplacement présumé du relai, mais en dehors du puits. A l’approche, je me décale vers l’intérieur du puits et pose les pieds sur une petite plateforme, et trouve R3 à l’emplacement parfait. Le relai est constitué de deux points, la cordelette a déjà trop vécu. Je pose un nouvel anneau de cordelette.

Je commence à tirer la corde pour la rappeler et .. rien. Je tire de toutes mes forces, non rien à faire la corde ne veut pas bouger pas d’un pouce. Ma pire crainte se matérialise. Je n’ai aucune envie de devoir remonter sur la corde, surtout dans cette configuration, avec un franchissement de rebord et toutes ses pierre instables au dessus de ma tête.

Je pose un bloqueur mécanique, et mets tout le poids de mon corps. Je tire la corde petit à petit, 20cm par 20cm ..Je tire, je tire, sans résultat au début. Et finalement, l’autre extrémité de la corde commence à remonter, de manière quasi imperceptible au début. Du coup, je poursuis la manœuvre.

Des centaines de squats plus tard, littéralement, je vois apparaître le nœud de jonction. Vous n’imaginez pas la joie que je ressent à voir .. un nœud :) Maintenant je sais que c’est bon, il ne me reste plus que quelques centaines de squats en plus et je récupère ma corde.

Soulagé, je reprends la descente. Quelle ambiance, incroyable ! J’en ai fait un paquet de rappels, mais celui là, dans ce gouffre, en solitaire, ça génère émotions et souvenirs ! Ouah !

Pendant la descente vers la base du puits, je passe devant la lucarne, grandiose là aussi.

J’aperçois plus bas un rappel chaîné confort, je me dépose là pour faire R5.

L’équipement est très hétérogène : parfois un simple goujon, des fois deux, et là deux beaux goujons reliés par une chaine et deux gros mousquetons. Juste à côté, il y a une ouverture de ce qui pourrait constituer l’entrée d’une grotte ? Je ne veux pas m’éterniser et laisse le mystère entier.

Depuis le bas du puits, la vue sur la combe du Loup.

Je reprends la descente.

A quelques dizaines de mètres de moi, une ‘météorite’ tombe des sommets qui me surplombent, en sifflant d’un bruit annonçant la mort et vient exploser dans le cirque. Il ne va pas falloir traîner par ici longtemps.

Je trouve le relai de R5, et ressert l’écrou qui avait pris du jeu.

La descente se poursuit, la vue se dégage sur les flancs et laisse voir une paroi assez intimidante.

Ce rappel va me déposer dans les pentes terminales.

Par ici devrait se trouver R6, mais ni je le vois, ni ne comprends quel indice me permettrait de mettre la main dessus. Il y a trop de possibilité dans ces pentes. Et d’ailleurs, ai-je vraiment besoin d’un rappel ? Je range tout le matériel technique, et part directement à la descente sans rappel, ce sera plus rapide ainsi.

Au passage, j’ai un autre angle de vue sur le passage d’escalade en traversée de la montée.

En sortant du cirque, et tandis que je suis hors de tous dangers, je ressent une joie immense pour cette journée et l’accomplissement de cette course engagée.

La descente vers la combe du loup est assez plaisante tandis que je surfe dans les pierriers, suivi des dernières pentes herbeuses.

Un dernier regard dernière moi, les parois prennent l’ombre et le puits de Pertusa semble se distinguer encore plus dans ces reliefs tourmentés.

Un véhicule 4×4 est stationné dans la combe du Loup, il s’agit probablement d’un chasseur, mais je n’aurais vu personne de la journée.

Répétitions ?

Petites remarques conclusives à destination des éventuels prétendants répétiteurs : bien que l’on parle ici de ‘randonnée du vertige’, il me semble utile de préciser que ce type de course montagnarde est bien plus que de la randonnée, est assez engagée, ne doit pas être pris à la légère et ne s’adresse qu’à des personnes expérimentées. Le rocher est très fracturé et expose notamment à des risques de chutes de pierres.

Bref, c’est exposé et engagé, vous aurez été prévenu.

Mon parcours

  • Distance (km) : 5
  • Dénivelé (m) : +-850
  • Altitudes (m): mini 1260, maxi 2115
  • Horaires : départ 8h25, retour 17h30, durée avec pauses : 9h05

2 Comments

  1. Bravo pour le solo ! Il fallait oser ! Le passage de la première vire confirme mon impression (pour aller faire l’escalier de la Fuvelle en solo, je suis passé d’abord par le Couravou – cf. https://photos.app.goo.gl/6ED2dzHMf4bzMnJk8).
    L’auto-assurance y est-elle nécessaire ou peut on passer sans mais en faisant très attention (bonnes prises de pieds/mains) ?

    Reply
    • Tout est affaire de niveau d’engagement que l’on accepte personnellement de prendre, à cet instant là .. Je pense que l’on peut faire sans auto assurage, en restant dans le bon passage. Mais comme je me suis un peu trompé sur l’itinéraire, je préfère ne pas trop m’avancer. Il vaudra mieux avoir un bon niveau d’aisance avec un gros sac. Et c’est toujours plus facile à dire depuis son siège chez soi..

      Reply

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